Paul Deyris
De la Gymnastique à la Course Landaise
Paul Deyris plus connu sous le diminutif de Popaul, est né le 12 août 1925 à Amou sur cette terre qui a tant donné à la course landaise. Comme bon nombre de jeunes à cette époque là, Popaul travailla très jeune sur la ferme familiale dont l'activité était orientée vers l'agriculture et l'élevage. Mais on était encore loin du bétail sauvage sur les prairies de Carrière.
Grâce à un papa tauromache, il découvrit enfant la corrida à Dax avec les maestros de l'époque : Antonio Bienvenida, Domingo Ortega et Martial Lalanda.
Comme tous les jeunes chalossais, il assistait aussi aux courses landaises et a pu applaudir Coran et Gérard, des toreros landais de grand renom.
C'est par la gymnastique que Popaul Deyris a commencé à fouler le sable des arènes. Gymnaste de talent aux agrès et aux barres parallèles, avec Roger Bordes le père de Didier et un troisième camarade, Popaul avait monté un spectacle d'acrobatie au sol et des numéros main à main. L'idée leur vint de se produire aux entractes des courses landaises.
C'est ainsi qu'en 1947 à Barcelonne du Gers, avec l'autorisation de M. Maigret, ce trio baptisé "les Stella", du nom du patronage "l'Etoile d'Amou", présentait son premier spectacle. Un succès inespéré puisque durant trois années, nos vaillants gymnastes se produisirent dans toutes les arènes des Landes, du Gers et des Pyrénées Atlantiques.
En 1948, Roger Bordes abandonne le trio pour débuter une carrière de torero chez Labat. Il fut remplacé pour continuer à assurer des spectacles, mais la lassitude commençait à gagner Popaul car les numéros étaient physiquement pénibles et les spectateurs peu généreux envers ces jeunes sportifs.
Un jour de course à Pontonx, le 19 avril 1948, avec la ganaderia Labat, Popaul se mit en tête de sauter une vache : au hasard, Volontaria la reine du troupeau. Franchie deux fois à la course, deux fois pieds-joints, la coursière se vengeait au troisième passage pieds-joints n'appréciant guère les évolutions de ce jeune sauteur en costume du dimanche. Quelques points de suture pour Popaul et quelques accrocs au costume furent les conséquences de sa témérité.
Encouragé par André Cazaux le sauteur de Joseph Labat, le jeune amollois récidiva le dimanche suivant à Doazit.
C'est ainsi que Popaul Deyris commençait une carrière de sauteur entraîneur qui devait le mener chez Labat, Maigret, Larrouture, Pabon et Latapy.
Comme il aimait à le rappeler, à cette époque, en seconde, les écarteurs et les hommes en blanc faisaient un peu de tout. On aidait à trier les coursières, à les charger et les décharger ; Popaul a même tenu la corde.
En 1967, il mit un terme à sa carrière; une carrière bien remplie.
Après avoir été acteur, Popaul Deyris voulait devenir ganadéro; une idée qui trottait dans sa tête depuis déjà quelque temps car il était éleveur dans le sang.
Tout d'abord, il fit l'acquisition de deux jeunes toritos nés chez Maigret, puis une fille de Magentina et enfin un rejeton mâle de Lucia.
Malgré la mise en garde de ses parents, peu favorables à ce projet, le dynamique Popaul prit la route de la Camargue au volant de son camion. Direction Albaron à côté des Saintes Marie de la Mer.
Après bien des discussions, et quelques embûches, Popaul réussit à ramener à Amou huit bêtes de l'élevage Jalabert qu'il parque dans les enclos de Carrière, aménagés pour recevoir des coursières.
A l'époque, certains l'avaient pris pour un fou, d'autres pour un messie, d'autant plus qu'il était revenu à Amou avec les huit coursières, le jour du marché. Inutile de préciser qu'il n'était pas passé inaperçu !!
Durant un certain temps, Popaul les soigne et les bichonne. Mais l'intérêt d'une telle acquisition était de produire des spectacles ; et pour produire des spectacles, il fallait posséder une cuadrilla, ce qui n'était pas le cas de Popaul. Avec l'accord de M. le Curé d'Amou, il obtient l'autorisation d'organiser une course aux arénes d'Amou, en nocturne, à l'occasion de la kermesse paroissiale, le 1er juin 1969. Restait à trouver des hommes. Amou, chacun le sait, a toujours été un creuset pour la course landaise. Avec l'autorisation des différents ganaderos de l'époque, tous les écarteurs d'Amou avaient donné leur accord de principe. Pour le sauteur, Joseph Labat avait donné son accord pour qu'Henri Duplat soirt également de la f^te. Et comme dirait Popaul Deyris c'était parti. Ainsi défilèrent ce soir-là, au son de la Marche Cazérienne, devant un nombreux public, Roger Bordes, Maxime le père de Didier Goeytes, Jean Bourdette, Daniel Vergoignan, Lafitteau II, Marc-Henri, Pierrot, André Duffau et Henri Duplat à la voltige. La course eut un succès considérable. Pour Popaul le pari était gagné, et il était lancé sur cette voie qu'il s'était tracée.
Le succès aidant, les contrats commencèrent à affluer. Mais il était difficile pour Popaul Deyris de tous les honorer car il ne pouvait disposer des écarteurs que lorsqu'ils étaient libres avec leur ganaderia respective. Malgré ce handicap de ne pas avoir une équipe et d'assurer un spectacle avec des toreros différents presque à chaque fois, Popau repart en Camargue par deux fois et termine l'année avec 24 coursières. Ne voulant pas être "à la remorque des autres" pour reprendre son expression, l'année suivante (en 1970), il décide de constituer sa propre équipe avec encore des fidèles tels Néné Lafittéeau, Daniel Vergoignan, Eloi Nougaro, Gilbert Laloubère, le fils de la maison Jean-Louis et bien d'autres. L'aventure pouvait donc se poursuivre avec une équipe complète portant les couleurs amolloises.
L'année 1971 voyait Popaul accéder à la formelle : le rêve suprême était enfin atteint. Commençaient aussi les déboires, les amendes et les blâmes avec la FFCL concernant les litiges avec Jean-Paul Lavigne et Michel Dubos. Peu à peu, malgré les embûches, le vaillant Popaul a fait son bonhomme de chemin en formelle et ses qualités de Ganadero et d'éleveur ont été reconnues comme la qualité de ses différentes cuadrillas de formelle et de seconde. De 1976 à 1980 ses coursières Estanite et Claudia ont remporté la "Corne d'Or".
En 1987, Popaul Deyris passait le relais à son fils Jean-Louis qui le secondait déjà depuis bien des années. Flambeau repris avec le succès que l'on connaît
Popaul Deyris a coulé une retraite paisible à "Carrière", continuant à suivre les courses de la région. Des souvenirs ? il n'en manquait pas. Le fait marquant ? c'est d'avoir pu réaliser son rêve, à savoir créer sa propre ganaderia. Avec un esprit vif, une mémoire sans faille et sa verve toujours intarissable, sa popularité était restée toujours intacte. Popaul était un personnage attachant qui avait su nouer des liens d'amitié avec bon nombre de personnes, voir de personnalités, y compris d'ailleurs au-delà des Pyrénées.
Popaul Deyris : un sacré personnage qui à la sueur de son front a su se faire une place dans le monde de la Course Landaise.
Le ganadero Paul Deyris est décédé fin décembre 2018 à l'âge de 93 ans, ses obsèques se sont déroulées à Amou le 29 Décembre en présence d'une foule d'amis et de tauromaches.