(1ère partie). Michel Puzos
A la sortie de la guerre en 1945, il ne subsistait plus grand chose. J'entends par là qu'on ne parlait même pas de ganaderias mais de troupeaux qui se réduisaient la plupart du temps à quelques bêtes que leurs propriétaires, étant donné les difficultés qu'avait occasionnées la guerre, avaient eu beaucoup de mal à garder et à entretenir.
La ganaderia de René Larrouture avait débuté avant la guerre et avait subi maintes péripéties, notamment lorsque certaines bêtes avaient péri dans un incendie le 12 juillet 1925 à Laluque.
René était écarteur, il débuta dans les arènes d'Estibeaux en 1920. Il se fit remarquer devant les coursières de Bats, de Darnaudet, de Danthez, de Barrère pour qui il se couvrit de gloire au « Vel d'hiv » de Paris, puis de Curron-Grit. Il rachètera le troupeau à Paul Grit et restera ganadero jusqu'en 1930 date à laquelle il vendit ses bêtes à Lafitte d'Eauze, tout en conservant quelques bêtes pour les novilladas… et il reprendra alors sa carrière d'écarteur chez Barrère puis Saint-Martin. En 1939, son départ pour la guerre l'obligea à vendre la totalité du bétail qu'il avait conservé, anéantissant de laborieux efforts. A la fin de la guerre il remonta un troupeau avec l'aide de Lataste et de Saint-Martin.
Il avait parqué ses vaches à Herm (commune du Grand Dax), puis avait déménagé le troupeau sur Saint-Jean de Lier, sur deux sites : celui de « Constantine » sur les bords de l'Adour, et l'autre à l'entrée du village où elles stationnaient durant tout l'hiver. Toutes les vaches étaient attachées par un estac, une corde reliée à un piquet en bois, à une distance de 3m les unes des autres.
Camille Bats était le vacher, et il fallait voir avec quelle dextérité il attachait ces vaches, qu'il appelait chacune par leur nom, et qui le respectaient et le craignaient. Pour rassembler le troupeau il avait de très bons chiens dressés à cet usage, et il faisait claquer le fouet. A ce seul bruit sec, les bêtes se mettaient en mouvement, les chiens servant alors de guides. C'était Camille qui amenait les vaches pour les courses. Et il lui arrivait même, si besoin était, de tenir la corde pour les courses de novillos destinés aux amateurs.
Les vaches de René Larrouture avaient des origines de Camargue : manades Yonnet, Saurel, Lescot, François-André… Il possédait un lot de portugaises dont était sortie la célèbre Zébra. Il possédait aussi des « Camargue » pures (sans croisement) venant de chez Fanfonne Guillerme. C'est lui d'ailleurs qui avait rentré les premières dans les années 1957-1958. Les gens, pas très au courant, appelaient toutes les « Camargue » pures des Fonfonnes, croyant que c'était un synonyme de camarguaises, et ignorant que le nom s'écrivait avec un « a » et portait le nom de la manadière Madame Fanfonne Guillerme. De cette manade était sortie la célèbre Boléra, puis la Cierba de Joseph Labat. Le ganadero Jean-Charles Pussacq acheta aussi diverses vaches chez cette grande dame, d'où sortirent notamment Francisca, Magali etc… coursières réputées à l'époque.
La ganaderia Larrouture possédait à l'époque dans les 50 à 70 vaches lui permettant d'assurer jusqu'à 40 courses formelles et de nombreuses courses de seconde, aux quatre coins de la France (en 1953, à Paris, il recvra d'ailleurs la Coupe du Festival International des arènes de Lutèce). René Larrouture, malgré les coups durs, les graves blessures, les deuils cruels autour de lui, poursuivit sa route… et dans les années 50 à 70 il se hissa au niveau des grandes ganaderias, et obtint avec Marcel Forsans, au cours des dernières années de sa vie, les plus grands titres.
En 1964, compte tenu du nombre important de troupeaux de formelle, il se rapprocha de la ganaderia Pabon (Adèle et Raoul Pabon). L'Entente Larrouture-Pabon va alors tenir le haut de l'affiche, remportant trois années consécutives (1966, 67 et 68) le Challenge Landes-Béarn.
Entente Larrouture-Pabon
Le 26 juillet 1970, René Larrouture décédait à Ossages. C'est une des figures les plus marquantes de la course landaise qui disparaissait.
Auprès de lui, un autre personnage s'est illustré, Lucien Stetin qui s'occupait plus particulièrement des courses de seconde et tenait le micro pour présenter et animer les courses.
Les fils de René Larrouture, Robert et André, reprirent le flambeau et poursuivirent le chemin tracé par leur père. Jusqu'en 1983 date à laquelle André Larrouture vendit le troupeau à Michel Agruna.
Quelques vaches célèbes de la Ganaderia Larrouture
Ruperta (Yonnet), Montañera (Moussé), Zebra (Oliveira), Mimosa (Diaz), Loca (origine Camargue), Andalouse, Miura et Carmencita (toutes trois de chez Julio Vasquez)